Industries vertes et green business, l’urgence d’une stratégie africaine ambitieuse face à l’UE, aux USA et à la Chine

 

La lutte contre le changement climatique offre d’immenses opportunités de green business pour les entreprises et les États. L’Afrique doit prendra sa part.

 

C’est la raison pour laquelle, en 2009, nous organisions à Paris le forum sur le green business et l’investissement en Afrique en partenariat avec UBIFRANCE (devenu Business France). Nous avons ensuite poursuivi la sensibilisation sur le continent avec quelques organisations du secteur privé. 

 

La transition vers une économie bas carbone est aujourd’hui au cœur des grandes manœuvres pour l’attractivité des industries vertes. Celles-ci seront en effet les locomotives de l’économie mondiale dans les prochaines années.

 

A l’heure du protectionnisme écologique, de la séduction des entreprises vertes, de l’émancipation par rapport aux règles de l’Organisation Mondiale du Commerce au nom des intérêts nationaux et du positionnement sur le green business, en dehors de quelques pays pionniers, l’Afrique n’a pas une stratégie ambitieuse pour attirer les industries vertes et se positionner fortement sur le green business.  

 

Les industries vertes au cœur de la nouvelle guerre commerciale entre l’Europe, la Chine et les États-Unis

 

Comme à chaque fois qu’il s’agit de l’intérêt suprême de leur économie, les Etats-Unis ne s’encombrent pas de la prise en compte des conséquences de leurs initiales sur le reste monde y compris chez leurs proches partenaires. 

 

C’est ce que l’Union Européenne (re)découvre avec la loi américaine sur le climat IRA : Inflation Reduction Act qui prévoit des subventions de 369 milliards de dollars aux entreprises qui développent des technologies vertes aux USA. Il s’agit d’un véritable appel d’air pour les industries mondiales notamment européennes. 

 

Face à cette importante menace, l’Union Européenne se met en ordre bataille. 

 

C’est depuis le Forum Économique Mondial de Davos que la Présidente de la Commission Européenne, Ursula VON DER LEYEN a annoncé une loi pour « une industrie à zéro émission ». 

 

Selon Thierry BRETON, le Commissaire Européen en charge du Marché Intérieur, le besoin en technologies propres se chiffre entre 2 et 5 % du Produit Intérieur Brut (PIB) européen soit un montant compris entre 342 et 858 milliards de dollars selon nos calculs sur la base d’un PIB européen estimé par la Banque Mondiale à 17 177 milliards de dollars en 2021.

 

De son côté la Chine a aussi mis en place des subventions pour les technologies propres et industries vertes tout en restreignant l’accès à son marché. 

 

Les besoins sont énormes. 

 

Selon Ruth HOROWITZ, Vice-Présidente Régionale d’IFC pour l’Asie et le Pacifique « Pour atteindre l’objectif de zéro émission nette d’ici 2060, le rapport (national sur le climat et le développement, ndlr) estime que la Chine a besoin de 14 à 17 000 milliards de dollars d’investissements supplémentaires dans les infrastructures et les technologies vertes, dans les seuls secteurs de l’électricité et des transports. » 

 

Les enjeux d’une grande ambition africaine d’industrialisation verte et de green business

 

Dans son excellent rapport économique sur l’Afrique publié en 2016 intitulé « vers une industrialisation verte en Afrique », la Commission Économique pour l’Afrique des Nations Unies a posé les bases et proposé des pistes pour accélérer l’industrialisation verte et le green business sur le continent. 

 

Face à la nouvelle guerre économique autour des industries bas carbone, il faut non seulement implémenter ces recommandations mais être aussi plus ambitieux dans la stratégie à déployer pour l’attractivité en Afrique des industries vertes et le verdissement des industries africaines.

Il y a urgence. 

 

Certes les pays africains ont adopté, et pour certains actualisés, les Contributions Déterminées au niveau National (CDN) pour s’aligner sur l’Accord de Paris. Mais ces CDN, dont les besoins de financement sont estimés à 2 800 milliards de dollars d’ici 2030, n’impriment pas assez sur la stratégie de développement des différents pays. Il faut donc un meilleur alignement.

 

Quand les actifs liés aux énergies fossiles (quasiment toute l’économie actuelle) seront devenus très risqués au regard des critères de financement, de la multiplication des procès pour non-respect de la loi sur le Devoir de vigilance, de l’entrée en vigueur de la taxe carbone ou encore pour la réputation des entreprises, les cadres et dirigeant.e.s africain.e.s comprendront mieux l’urgence de décarboner leurs économies même si l’Afrique représente à peine 4 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre.

 

Malheureusement, il sera un trop tard.

 

Les actifs liés à l’économie carbonée vont perdre de la valeur. Il faut donc s’appuyer, quand il est encore temps, sur ces industries de l’économie « brune » pour accompagner la transition des pays vers l’économie verte et accélérer le verdissement des industries. 

 

De plus, il y a actuellement une pression importante sur les acteurs financiers internationaux pour le verdissement de leurs portefeuilles et le renoncement au financement des énergies fossiles.

 

Parallèlement la finance carbone offre d’immenses opportunités. 

 

La dernière initiative des banques vertes africaines de la Banque Africaine de Développement (BAD) mérite d’être soutenue et promue. Dotée d’un fonds fiduciaire d’1,5 milliard de dollars, elle vise à faciliter les financements internationaux qui passeront de 3 % actuellement à 10 % par an d’ici 2030 selon la BAD. 

     

L’urgence d’un réveil du secteur privé et des entreprises africaines 

 

Le silence de la majorité du secteur privé africain sur l’industrialisation verte et le green business est surprenant et inquiétant.

 

A l’exception de quelques organisations patronales comme la très visionnaire Confédération Générale des Entreprises du Maroc (CGEM) avec sa Commission Compétitivité Énergétique et Économie Verte dont les priorités du mandat sont alignées sur le green business (énergie verte, industrie verte, mobilité durable, efficience hydrique et environnement & climat), trop peu d’organisations du secteur privé africain ont des engagements à la hauteur des enjeux.

 

Il va pourtant falloir réussir le découplage entre la quantité de matières premières et d’énergies fossiles consommées par unité de biens / services et la croissance de la production industrielle. 

 

Dans 10 ou 20 ans, il est évident qu’aucune entreprise africaine n’aura un business model identique à celui qu’aujourd’hui. Enfin pour celles qui n’auront pas déposé le bilan.

 

Il faut donc lancer la mobilisation générale sur l’industrialisation verte et le green business en Afrique.

 

Les programmes MEDTEST I et II menés par l’ONUDI en Afrique du Nord ont permis de démontrer l’obtention de rentabilité en moins de 6 mois grâce aux économies d’énergie, la gestion rationnelle de l’eau, la circularité du traitement des déchets et l’optimisation de la production industrielle. 

 

Avec la digitalisation, la RSE intégrée dans les processus, le déploiement des technologies vertes et l’optimisation des chaînes logistiques, il y a encore d’immenses opportunités offertes par l’écologisation des industries africaines notamment dans les petites et moyennes industries.

 

Thierry TÉNÉ

 

Associé et Directeur

Afrique RSE

 

Lauréat du prix spécial ISAR 2022 de la Conférence des Nations Unies pour le Commerce et le Développement (CNUCED) dans la catégorie internationale 

 

Co-fondateur de la plateforme digitale de RSE intégrée et du label Doing Good In Africa (DGIA) : https://doinggoodinafrica.com

 

Tel / Whatsapp :  +33 6 75 37 49 67 

 

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Editeur du magazine Dirigeantes

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